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Dans mon travail, les figures frontales et hyperréalistes incarnent un idéal artificiel, suspendues dans un entre-deux où les frontières entre le vrai et l’illusion s’estompent.

Depuis 2018, je développe la série de dessins « Persona non grata », qui explore notre rapport au réel à travers des portraits réalistes en apparence, mais issus d’un processus numérique de déconstruction et de recomposition. En manipulant, superposant et fusionnant des fragments de visages photographiques, je crée des figures hybrides virtuelles, transférées manuellement sur du papier Japon via un procédé artisanal, associant chimie et gestes traditionnels.

Ce transfert confère aux visages une matérialité singulière et inscrit dans le papier la fragilité des contours et la texture de la peau. C’est dans cette phase que la précision du dessin rencontre la plasticité du support, donnant naissance à une ambiguïté visuelle marquée. Mon geste de dessinatrice affine et intensifie la composition. Il ajoute une dimension tactile et sensible qui ancre l'image dans le réel tout en soulignant son caractère illusoire. 

Le trait graphique, fusionné à l'empreinte photographique, donne l’impression que mes personnages viennent d’être saisis par l’objectif et leur confère une apparence troublante de vie. Pourtant ils sont le fruit d’une construction minutieuse, des créations numériques, élaborées avec une précision presque algorithmique. Ainsi chaque œuvre se transforme en un espace d'interrogation, où le visible échappe à sa simple apparence et où la frontière entre le tangible et l’intangible se dissout. Chaque image, oscillant entre transparence et opacité, prétend saisir la réalité tout en dévoilant son empreinte de construction et de mensonge. Elles invitent le regardeur à explorer non seulement ce qui est exposé, mais aussi ce qui reste subtilement dissimulé, nourrissant une réflexion continue sur la nature même de l'image et sa capacité à redéfinir notre compréhension du réel.

Mon travail sur la matière et la trace, combiné à une manipulation rigoureuse des standards de la beauté et des stéréotypes visuels, aboutit à une série de visages uniformisés et dérangeants. Ces figures, presque gémellaires, créent une impression de « déjà-vu » et suscitent une réflexion sur la standardisation de la beauté et notre perception du corps et de l’identité. En brouillant les frontières, mes œuvres questionnent les codes visuels dominants et lissent la représentation dans un jeu ambigu entre authenticité et simulacre, entre vie et figuration.

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